Navigo obligatoire : vers le contrôle des existences à marche forcée

Maintenant, en région parisienne, vous paierez cinq euros si vous oubliez de « composter » votre passe Navigo. Mais rassurez-vous, c’est pour notre bien que la RATP nous prend pour des cons.

L’enfer est pavé de bonnes intentions. Il va falloir rapidement apprendre ça à nos gosses, puisque les cas d’écoles se multiplient par les temps qui courent. Au sein de cette pauvre époque qui ne se concentre plus que sur un seul objectif : empêcher un être humain de n’être plus surveillé.

Ainsi, lorsqu’à Paris un promeneur négligeant (c’est-à-dire un homme dangereux pour l’équilibre social) oubliera de composter son passe Navigo en prenant le bus, il risquera cinq euros d’amende. On lit sur metrofrance.com que la RATP voit cela comme une mesure « avant tout pédagogique ». Et elle a pour but d’améliorer le service. « C’est à partir du nombre de validations que l’on établit la fréquentation et que l’on adapte l’offre », indique une responsable de la RATP sur Métro.

C’est donc, si je sais bien lire, pour notre bien qu’ils nous prennent pour des cons.

Il va devenir interdit d’être distrait

On se pince, mais non, on ne rêve pas : nous vivons en plein cauchemar. Est-il besoin d’expliquer en quoi cette mesure de faire payer les usagers distraits est honteuse ? Qu’il est bien évidemment tragique d’obliger un être vivant sur cette planète à composter son billet pour que le moindre de ses déplacements soit enregistré quelque part ? Dans la modernité, il devient interdit d’être distrait. Insupportable d’être distant. Inacceptable de n’avoir pas envie de donner d’avis. Louche de n’avoir pas envie qu’un disque dur enregistre que, le 27 mars 2012 à 18h34 et 32 secondes, on était dans le bus 27 en train d’écouter de la musique (puisque souriez : vous êtes aussi filmés !).

Tout cela rappelle furieusement l’affaire des compteurs électriques Linky. Ces compteurs qui devaient être gratuits et simplifier la vie de tout le monde sont finalement payants. Et ils poseraient des petits problèmes en termes de respect de l’intimité des usagers. Faut-il s’en étonner ? Pas vraiment, puisqu’on voit bien que les solutions « magiques » et « égalitaires » que nous proposent les grands de ce monde se transforment neuf fois sur dix en usines à gaz liberticides. Et qu’au final la Collectivité doit se serrer un peu plus la ceinture pour boucler le budget – et sans trop se plaindre, s’il vous plaît. Cela fait des années que les peuples se font empapaouter (pour rester poli) ainsi. Il serait désolant d’avoir à constater qu’après tout, ils aiment ça.

Seul l’astéroïde DA14 pourra bien finir le boulot

Pourquoi, au fait, ces compteurs Linky ont-ils été imaginés ? Vous l’avez deviné : pour nous aider, pour créer du lien (quelle blague, créer du lien alors que l’époque est à l’individualisme radical). C’est-à-dire, dans leur langage de morts-vivants, « permettre aux gestionnaires de réseau de distribution d’améliorer leur qualité de service et de réaliser des gains de performance ».

En fait, ils essaient de nous faire croire qu’à terme, nous arriverons à faire de la France un pays parfaitement dirigé, alors que tout ce qui se passe c’est que les conneries d’aujourd’hui s’ajoutent au conneries d’hier, nécessitant un plan d’urgence pour réfléchir à la mise en place de leviers d’actions destinés à accélérer celle des conneries de demain.

Quelle triste fin pour le petit Linky ! Encore une fois, c’était pour notre bien à tous, mais pour des raisons indépendantes de la volonté de la bande d’arnaqueurs surdiplômés qui fait semblant de nous gouverner, ça a encore raté, et ce sont ces cons d’usagers qui devront payer en dernière analyse. Mais aucune inquiétude : la prochaine méga-arnaque d’optimisation de système se profile à l’horizon, et elle, ce sera la bonne.

Il est trop tard pour espérer quoi que ce soit de salvateur de la part de ces rigolos de politiques. Appellons-en directement au meilleur ami de l’Homme : l’astéroïde DA14, qui a eu le mauvais goût de ne faire que frôler la Terre le 15 février dernier. DA14, revient, et cette-fois ci finit le boulot. Au premier satellite que tu croiseras, prend un virage serré sur ta gauche, et abrège nos souffrances en mettant un point final à cette mascarade.

Crédit photo : nicolasnova / Flickr.com
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2 réponses à Navigo obligatoire : vers le contrôle des existences à marche forcée

  1. Lybertaire dit :

    Décidément, j’aime ce blog ! La RATP est coincée entre flicage abusif et rentabilité abusive.

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