Et si Sarkozy perdait en 2012 ?

A trois semaines des élections régionales, le Président de la République fait face à une cote de popularité en berne. A plus long terme, il pourrait également être confronté à une division de la droite, et à la candidature possible de Dominique Strauss-Kahn. De mauvais présages avant 2012.

Comme le temps passe. Il y a un peu moins de trois ans, Nicolas Sarkozy l’emportait largement sur Ségolène Royal au second tour de l’élection présidentielle. Dans la foulée, l’UMP déferlait sur l’assemblée nationale aux législatives. François Bayrou, l’espoir tardif du premier tour, était lâché par ses soutiens, Hervé Morin en tête, qui préféraient naviguer en eaux calmes aux côtés du paquebot de la majorité. Miné par les querelles internes, le PS s’enfonçait dans la crise et la guerre des lieutenants…

Bref, sa victoire acquise et l’opposition en lambeaux, Nicolas Sarkozy pouvait endosser tranquillement son habit de capitaine, régner sans partage sur la vie politique française, et même s’autoriser quelques frasques « bling-bling », très mal vues de l’opinion publique. Qu’importe quand on est seul maître à bord.

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Trois ans et une crise économique plus tard, la stratégie Sarkozy a pris l’eau. Le Président de la République dégringole dans l’estime des Français. Ce que confirment deux sondages parus mardi dernier, et repris par le Journal du Dimanche. Même le Figaro, peu suspect de gauchisme primaire, est forcé de constater la chute et titrait le 21 février sur un Nicolas Sarkozy au plus bas depuis 2008. Le Président fait bien sûr les frais d’une croissance qui patine et d’un chômage en hausse. Mais il paye aussi la manière dont lui-même et son gouvernement ont géré la crise, donnant l’impression de sauver les banques en oubliant le reste de la nation. A cet égard, les récents articles de presse sur la reprise des folies de la finance mondiale et la sortie prochaine du livre de Florence Aubenas sur les travailleurs précaires ne sont pas pour venir en aide à l’Exécutif.

Clearstream, débat sur l’identité nationale…

D’autres causes expliquent le désamour croissant entre les Français et le chef de l’Etat. L’acharnement dont celui-ci a fait preuve dans l’affaire Clearstream en fait partie. Tout comme le colossal fiasco du débat sur l’identité nationale, défendu bec et ongle par le Président avant d’être maladroitement passé à la trappe. Par ailleurs, à une heure où l’emploi est clairement la préoccupation principale de la majorité des Français, l’annonce récente de nouvelles mesures sécuritaires -dont beaucoup ont été dénoncées par des avocats sur le plateau de C dans l’Air– n’a pas permis de capter l’attention de l’opinion. Pas davantage que les multiples prestations du Président à la télévision, la plus récente l’ayant vu batailler contre dix Français « lambdas » sur le plateau de TF1.

Cette tendance au populisme exaspère aujourd’hui autant qu’elle a séduit hier. Surtout, en se plaçant de cette manière sous le feu des projecteurs, au contraire de son prédécesseur lors de son second mandat, le Président a provoqué un retour de flammes qui joue aujourd’hui en sa défaveur. Le discret et besogneux François Fillon, lui, reste à 50% d’opinions favorables dans les sondages qui constatent la déchéance présidentielle.

Strauss-Kahn, le retour ?

Il y a plus grave pour Nicolas Sarkozy. Le Président était jusque là le seul prétendant sérieux à sa propre succession en 2012. Or le retour en politique de Dominique de Villepin, qui affiche clairement ses ambitions présidentielles, pourrait bien diviser la droite à l’heure du verdict. Au cours de son tour de France, il a d’ailleurs lâché quelques piques acérées en direction de l’Elysée et des cadors de la majorité, malicieusement relevées par Le Post. Et si l’ancien Premier ministre, jamais élu auparavant, a peu de chance d’accéder au second tour, Nicolas Sarkozy devra aussi composer avec la candidature possible de Dominique Strauss-Kahn.

L’ancien ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie du gouvernement Jospin, exilé au Fonds monétaire international (FMI), s’est taillé une réputation internationale et l’envergure d’un chef d’Etat potentiel. Début février, il a laissé entendre que sa candidature en 2012 -qui l’obligerait à démissionner de son poste de directeur du FMI- n’était pas impossible. Surtout, dans les sondages, Dominique Strauss-Kahn apparaît non seulement comme l’un des socialistes les plus crédibles pour l’élection présidentielle, mais aussi comme le seul à être en mesure de battre Nicolas Sarkozy au second tour. Les socialistes pourraient certes préférer Martine Aubry à l’actuel directeur du FMI… mais, instruit par l’échec de Ségolène Royal en 2007, il est probable qu’ils ne se résignent pas à envoyer un autre candidat au « casse-pipe ».

On pourra rappeler que les sondages ne font pas les élections. Et que, d’ici 2012, il peut se passer beaucoup de choses. Autant de raisons qui empêchent pour l’instant les médias de faire des suppositions hâtives. Mais, c’est un fait, la réélection programmée de Nicolas Sarkozy en 2012, encore quasi-certaine il y a quelques mois, n’est plus du tout une évidence aujourd’hui.

Pour en savoir plus : Strauss-Kahn laisse planer le doute sur sa candidature, sur le Figaro.fr et les mots et les maux du gouvernement, sur le Monde.fr

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Photo Flickr / Guillaume Paumier

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