Pilule minceur Alli : gare à l’esbrouffe !

La pilule « minceur » Alli est en vente dans les pharmacies depuis le 6 mai dernier. Cinq raisons de ne pas se précipiter sur ce médicament « miracle »…

Moins de trois semaines de vente, et la pilule Alli, vendue par le laboratoire GlaxoSmithKline (GSK) et supposée faire maigrir, suscite déjà la polémique. Malgré tout ce que laissent supposer les affiches publicitaires… Cinq raisons au moins incitent à ne pas trop croire aux « bienfaits » de cette pilule « minceur », disponible dans presque toutes les pharmacies de France.

1- Nouveau, vraiment ?

Alli est présenté comme une nouveauté… Mauvaise pioche ! L’orlistat, son principal composant, était déjà celui d’un autre médicament très similaire, le Xénical… qui existe depuis 1999. Or, ce médicament n’a jamais véritablement prouvé son efficacité. Une compilation d’études médicales révèlent que 49% des personnes ayant consommé ce médicament et suivi un régime ont perdu du poids… Mais, dans les mêmes conditions, 40% des personnes ayant consommé un placébo à la place du Xénical ont obtenu le même résultat. La différence est ténue. De surcroît, chaque pilule Alli contient 60 mg d’orlistat, contre 120 pour le Xénical. Pour des résultats deux fois moindre…

GSK n’a évidemment pas trop insisté sur ce point. La publicité -autorisée et déployée juste avant les mois d’été…- a même poussé de nombreuses jeunes filles minces à tenter d’obtenir ce médicament en pharmacie, alors qu’il ne s’adresse qu’aux personnes de forte corpulence : en dessous d’un indice de masse corporelle (IMC) de 28, la pilule Alli ne devrait pas être délivrée.

2- Mauvaises utilisations : attention !

Abuser de cette pilule ou ne pas l’associer à un régime faiblement calorique risquent de provoquer quelques mauvaises surprises… En effet, ce médicament fonctionne comme un « capteur de graisses ». Il empêche la digestion d’une partie des lipides et les élimine par les voies naturelles.

Ainsi, une personne consommant peu de lipides et utilisant Alli pourrait souffrir de mauvaises digestions, car les graisses facilitent le transit intestinal. A l’inverse, une personne qui absorberait trop de matières grasses risquerait de désagréables diarrhées… voire une incontinence fécale. Or, la pillule Alli peut avoir un aspect déresponsabilisant : je me soigne, donc je peux me permettre de manger gras…

3- Alli fait fondre… le portefeuille !

« Tu l’as pas fait le régime Weight-Watchers ? » « Si je l’ai fait » « Et t’as perdu combien ? » « J’ai perdu 3000 balles ! » On connait le sketch des Inconnus. L’histoire est un peu la même pour Alli, médicament très onéreux. Il faut compter 30 à 35 euros pour une petite boite (15 jours de traitement) et plus de 50 pour une grosse (un mois de traitement). Sachant que cette pilule doit permettre de perdre un kilogramme supplémentaire (dans le meilleur des cas !) pour 4 à 5 perdus grâce à un régime, le coût du poids perdu s’avère élevé…

On pourra objecter que le prix peut être variable d’une pharmacie à l’autre : c’est toujours le cas pour les médicaments délivrables sans ordonnance médicale et n’ayant pas d’équivalent remboursable. Sauf que GSK a pris soin de démarcher auprès des pharmaciens pour leur conseiller le prix à appliquer. Ainsi, inutile de se leurrer, Alli ne sera certainement pas moins cher dans la pharmacie d’à côté. Et n’y sera pas plus remboursé.

4- Les médecins sont sceptiques

Médecins généralistes et professionnels de la santé le martèlent : la seule manière efficace de perdre du poids reste une alimentation équilibrée et la pratique d’un activité physique régulière. Certains soulignent même que la prise en charge individuelle de l’obésité peut avoir un effet très culpabilisant… et s’avère souvent inefficace. Alli n’est donc au mieux qu’un complément.

La revue Prescrire rappelle par ailleurs que l’orlistat peut avoir des effets très néfastes. Par exemple, en s’attaquant aux graisses, ce produit élimine également la vitamine D qui y est contenue… laquelle a l’excellente idée de renforcer nos os. Autre problème : agissant comme un laxatif, Alli peut éliminer plus vite la pilule contraceptive… et rendre celle-ci inopérante.

5- Tout repose désormais sur les pharmacies

L’autorisation de mise sur le marché dont a bénéficié Alli émane du niveau communautaire. Ce qui signifie qu’en cas de problème, seule la commission européenne peut exiger le retrait du médicament… On peut dès lors s’interroger sur les rapports d’influence qui existent entre les instances européennes et les laboratoires pharmaceutiques. Car la commission a placé Alli dans la catégorie des médicaments distribuables sans prescription médicale… alors qu’une ordonnance était nécessaire pour obtenir du Xénical, produit très similaire.

Les pharmaciens deviennent donc seuls responsables pour vendre ou non Alli à leurs clients. Et même si on peut supposer que la plupart fourniront ce médicament seulement aux personnes qui en ont besoin, le risque de ventes abusives n’est pas à exclure totalement. Autre conséquence : les généralistes sont écartés du système. Il est désormais possible d’utiliser une pilule « minceur » aux effets potentiellement néfastes sans l’avis préalable d’un médecin, et sans aucun suivi médical.

Pour en savoir plus : un article de Rue89 sur le sujet et un article du Nouvel Observateur

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