A chaque fait divers, une nouvelle loi. On connaît la chanson. L’affaire Agnès nous livre un nouvel exemple de la désastreuse hypocrisie qui règne au sommet de l’État.
L’affaire Agnès a été l’occasion de constater l’hypocrisie qui règne au sommet de l’État dans le traitement des faits divers les plus sordides.
Quelques heures après la découverte du crime, on nous propose déjà des nouvelles lois pour diminuer le risque de voir se reproduire de tels faits. Ces mesures seront-elles applicables ? Efficaces ? Sont-elles réfléchies ? Peu importe, tout se joue sur l’émotionnel. C’est comme ça depuis 2007. Ceux qui, aujourd’hui, appellent au vote d’un nouvel arsenal juridique sont les mêmes qui, un beau jour, nous disent que les Roms constituent un vrai danger pour l’équilibre de la France, ou qu’il faut d’urgence nettoyer au Kärcher telle ou telle cité pour faire de notre pays un havre de paix. Certains sondages rappellent que l’insécurité ne progresse pas vraiment en France ? Eh bien on s’appuiera sur les statistiques du ministère de l’Intérieur, qui ont l’avantage d’être en partie manipulables.
Plutôt que de l’émotionnel court termiste, on préfèrerait une gestion beaucoup plus raisonnée des affaires. C’est bien de s’occuper des problèmes de banlieues et de celui des Roms, qui existent bel et bien, mais ne méritent certainement pas tout ce tapage. Mais on aimerait que les crimes les plus durs soient aussi les mieux traqués en amont, dans la mesure du possible. Or, dans l’affaire Agnès, il semble qu’il y ait eu des dysfonctionnements qui aient conduit un adolescent reconnu dangereux à être laissé en liberté.
Tout se passe comme si les meurtriers existaient depuis la semaine dernière
Si ce meurtre pouvait être évité, comme l’estime d’ailleurs François Fillon, c’est absolument scandaleux qu’il ne l’ait pas été. Alors même qu’on a le droit, depuis des années, à des centaines de discours indignés à chaque meurtre, tout n’a donc pas déjà été mis en place ? Eh bien non. Écoutez-les : tout se passe comme si les meurtriers n’existaient que depuis la semaine dernière. Et qu’ils avaient enfin trouvé la solution magique qu’ils allaient mettre en œuvre dès la semaine prochaine.
Autre hypothèse : peut-être qu’il n’y a pas eu de dysfonctionnement majeur du système sur cette affaire. C’était peut-être le cas sur un million où personne ne peut rien prédire. Mais, dans ce cas-là, qu’on nous dise la vérité, qu’on nous mette en face des réalités, et qu’on arrête d’essayer de nous faire croire qu’on pourra éradiquer ceci ou cela.
Cela dit, ne soyons pas dupes : si les politiciens se permettent ce genre de foutage de gueule, c’est qu’une partie non-négligeable de l’électorat a la faiblesse de croire qu’on pourra un jour, précisément, éradiquer ce genre d’acte. Nos gouvernants savent bien que l’on n’est pas élu Président grâce à un programme, mais par la répétition jusqu’à plus soif de belles fables qui « réenchantent le rêve Français », pour utiliser le langage marketingo-poétique de François Hollande.
Nous n’avons le choix qu’entre le Justice et le lynchage
Dire la vérité ? Aucun intérêt. C’est-à-dire aucun intérêt électoral. Ce genre de crime est bien sûr la faute des magistrats. Et si ce n’est pas de la faute des magistrats, c’est la faute des psychiatres. Et si ce n’est pas de la faute des psychiatres, c’est la faute des psychopathes. Qu’attend-on d’ailleurs pour euthanasier tous les fous ? Qu’on le veuille ou non, nous sommes en train, en laissant le primat à l’émotion, de nous diriger vers cette solution. Car au fond, l’humanité n’a le choix qu’entre la Justice et le lynchage (voir les films de Fritz Lang à ce sujet, M le Maudit et Furie).
La Justice, c’est ce qui arrive quand chacun prend ses responsabilités. Le lynchage, c’est l’inverse.
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