Premiers commentaires sur les élections européennes qui, comme attendu, n’a pas passionné les Français… ni les Européens.
Au lendemain de ces élections européennes, quels enseignements tirer de cette campagne et des résultats ? Réponse en cinq points…
1- L’abstention, grande gagnante
Comme on pouvait s’y attendre, le scrutin n’a pas mobilisé les foules… loin s’en faut. Moins de 40% des électeurs (38,8% selon les chiffres du ministère de l’Intérieur) se sont rendus aux urnes. « La France s’est massivement abstenue » notait Le Monde, quelques heures après le scrutin… tout comme les électeurs des autres pays de l’Union.
Ce nouveau record d’abstention montre à quel point ceux-ci se désintéressent de cette élection. La faute à une méconnaissance des institutions communautaires, mais sans doute aussi à l’éternel sentiment de se trouver « déconnecté » de la politique européenne telle qu’elle se pratique actuellement. Difficile de prendre au sérieux une Union qui tente d’adopter au « forcing » un traité rejeté par ses citoyens…
En France, les partis portent également la responsabilité de cette désaffection des urnes. Les débats, dans une large mesure, n’ont pas dépassé le niveau national. Entre un Parti socialiste qui a transformé cette campagne en plébiscite contre Nicolas Sarkozy et une majorité qui a ressorti des tiroirs ses vieilles recettes sécuritaires, les enjeux européens ont été largement ignorés. Ce qui, sans doute, n’encourage pas à se rendre aux urnes…
2- La percée de « Dany le vert »
On l’annonçait au coude-à-coude avec le Modem. Daniel Cohn-Bendit rafle finalement la troisième place. Fortes de leurs 16,2% -quand les derniers sondages laissaient présager un score maximum de 13%- les listes Europe-Ecologie se payent même le luxe de talonner celles du PS… et de les dépasser dans de nombreux cantons. En France, les listes des verts obtiennent 14 sièges parlementaires… autant que les socialistes.
Un succès que l’on peut attribuer au « casting » de « Dany le vert » selon l’analyse de France Info… L’ancien anarchiste a en effet pris soin de s’entourer de personnalités telles que José Bové ou Eva Joly. Il est également l’un des seuls à avoir parlé d’Europe durant la campagne.
Le succès demeure cependant très relatif au niveau européen, où le Parti vert reste extrêmement minoritaire -loin derrière les Partis populaire (PPE) et socialiste (PSE) européens- et quasiment marginal.
3- La victoire en trompe-l’oeil de l’UMP
Malgré une campagne atone, le parti majoritaire a su mobiliser ses forces électorales. Avec 28% des voix et trois ministres élus (Rachida Dati, Michel Barnier et Brice Hortefeux), l’UMP arrive en tête. Ce qui n’est pas si commun pour un parti au pouvoir depuis deux ans…
Cependant, l’UMP ne peut pas se targuer d’obtenir la majorité. Loin de là… Un lecteur du Monde.fr notait même sur le site internet que si l’on rapporte les voix de l’UMP au nombre d’inscrits et non de suffrages exprimés, le score du parti présidentiel tombe à 13%…
De surcroît, la droite est mathématiquement battue par la gauche. L’UMP et les divers mouvements de droite (y compris le FN) font moins bien que le PS, les écologistes, le front de gauche et les partis trotskystes. La « victoire » de l’UMP est donc à placer entre de gros guillemets.
4- La gauche européenne balayée
« C’est une triste soirée pour la social-démocratie européenne » lâchait l’eurodéputé allemand Martin Schultz après l’annonce des résultats. De fait, la France n’est pas le seul pays de l’UE où les forces de gauche modérée ont été battues à plate couture.
En Allemagne, en Espagne, en Italie et en Angleterre, les socialistes n’ont pas su profiter de la crise pour reprendre la main ou proposer de réelles alternatives. C’est donc le Parti populaire européen -alliance des conservateurs- qui conforte sa position et reste majoritaire au Parlement de Strasbourg.
Difficile pour le Parti socialiste européen de trouver une réponse commune tant les situations nationales sont variables. Les problèmes de Gordon Brown, englué dans l’affaire des notes de frais, et de José Luis Zapatero, qui commence à connaître l’usure du pouvoir, ne sont pas ceux de Martine Aubry ou de Franz Müntefering, dont les partis peinent à s’extraire de l’opposition où ils sont relégués.
5- Le Modem sanctionné, la gauche de la gauche trop désunie, et l’extrême droite en embuscade
Enfin, au niveau français, la dernière surprise vient du Modem. Troisième homme de la présidentielle de 2007, François Bayrou n’a pas récidivé son exploit et n’a pas réussi à s’imposer comme une alternative crédible. Avec 8% à peine, les listes centristes terminent la course loin derrière leurs adversaires directs… et parfois derrière le Front national dans certains cantons. François Bayrou paye sans doute là les conséquences de son altercation avec Daniel Cohn-Bendit sur le plateau d’Arlette Chabot, ainsi que sa virulence contre Nicolas Sarkozy… au détriment peut-être d’une véritable communication européenne.
Du côté de l’extrême gauche, la leçon n’a (toujours) pas été apprise. Regroupés, le NPA d’Olivier Besancenot, le Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon et Lutte ouvrière de Nathalie Arthaud réalisent un score très honorable. Désunis dans les faits, ils perdent toute possibilité de transformer ce « capital voix » en influence politique.
Enfin, si le Front national n’obtient que 6,3% des voix, d’autres partis d’extrême droite s’affirment en Europe, à l’image du FPÖ en Autriche, du British national party en Angleterre, et du PVV aux Pays-Bas.
Merci à Virginie pour ses observations sur cet article !
Pour en savoir plus : Les résultats en Europe sur Le Monde.fr
A lire aussi sur ce blog : Les pouvoirs du parlement européen
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Coucou Clément,
Je me demandais à propos de ces elections si c’était normal que les voix soient tant dispersées… Même si 5/8% ce n’est pas beaucoup, ce n’est quand même pas rien et il y a plusieurs liste dans ces eaux là. Habituel ou non?
et quid de l’extrême droite (en Europe) ? une évolution ? Merci pour cet article synthétique -et original.