Le seconde volet de la saga de Stephenie Meyer suscite bien des sarcasmes avant même sa sortie au cinéma. Et pourtant…
« Long », « Niais », « Calibré »… Plus de deux mois avant sa sortie au cinéma, Tentation, le second volet de la série Twilight, est déjà saigné à blanc par de nombreux blogueurs. Cette cascade de critiques fait suite à celles déjà essuyées par Fascination, le premier volet de cette histoire d’amours vampiresques… ainsi que par toute la saga écrite par l’Américaine Stephenie Meyer. A propos du premier film, beaucoup ont même montré les dents. « Bon sang que c’est mauvais ! » lâche ainsi Christophe Carrère (L’Express) sur son blog Des Pellicules plein la tête : « Twilight, chronique romantique avec des vampires passés à la craie (un vampire, c’est pâle), est au genre fantastique ce que High School Musical est au genre musical. Soit un produit calibré, fabriqué et vendu selon les règles de l’art des plus prestigieuses HEC du monde ».
« Les bons livres et les mauvais livres »
La pique est reprise sur de nombreux sites consacrés au cinéma… Réaction parmi d’autres sur Allociné : « Il faut arrêter de dire que tout se vaut et que tout n’est qu’une question de goût. Il y a de la bonne et de la mauvaise musique, de bons et de mauvais films, de bons et de mauvais livres ». Twilight, version littéraire, serait à ranger dans le même tiroir que Marc Lévy et Guillaume Musso. Et, sous forme de bobine, ne devrait certainement pas figurer à côté des « classiques » du vampirisme (Nosferatu, Le cauchemar de Dracula…). En cause : une intrigue insipide (Bram Stoker plongé dans les Feux de l’amour), des personnages creux (le vampire mystérieux et la belle ingénue), une recette éculée (l’éternel combat entre le bien et le mal), une écriture fade… La sollicitation de figures shakespeariennes pour la promotion du film provoque également une levée de pieux et de crucifix : Vade retro ! Edward et Bella, reprises modernes de Roméo et Juliette ? Et quoi encore !
Bref, Twilight égale produit marketing pour adolescents retardés, à mépriser, à jeter, à oublier ! Ce le sera d’ailleurs dans quelques années, soulignent les détracteurs. Qui, pour la plupart, se sont déjà offusqués du succès d’Harry Potter. Qui s’offusquent pour chaque production littéraire et cinématographique passionnant les foules. Qui s’offusqueront encore au prochain roman (et donc film) dans le vent. Et qui ignorent systématiquement dans leurs critiques que cinéma et littérature ne se nourrissent pas seulement d’inoubliables chefs-d’œuvre.
Jeter la pierre à Thierry la Fronde ?
Ainsi, sans le sketch des Inconnus, le personnage de Thierry la Fronde (campé par Jean-Claude Drouot) serait certainement tombé dans l’oubli. Est-ce une raison pour mépriser ce héros qui fit les beaux jours de l’ORTF ? On pourrait en dire autant des épisodes de Zorro, produits par les studios Disney entre 1957 et 1961. Et de beaucoup d’autres séries populaires à succès, dont les intrigues étaient plaisantes sans être complexes et les personnages attachants sans être bouleversants. Pourquoi ne pas pardonner aujourd’hui à Edward et Bella ce qu’on passa jadis à Thierry de Janville et Don Diego de la Vega ?
On peut par ailleurs souligner que notre époque n’a rien inventé en matière de succès commercial. A titre d’exemple, dès 1836, le journaliste Emile de Girardin comprend que la littérature populaire peut doper la vente de journaux. Il invente alors le concept de roman-feuilleton. Ces œuvres, divisées en épisodes et destinées au plus grand nombre, attisent l’appétit de lecteurs qui guettent avec avidité l’arrivé du numéro suivant… comme on attend de nos jours la sortie du prochain tome. Malgré les très violentes critiques qu’ils suscitent, en particulier du côté de la classe politique, les romans-feuilletons ont le bon goût d’initier le public à la lecture régulière.
On peut noter au passage que certains écrits conçus dans cet esprit ont été depuis élevés au rang d’œuvre incontournable. C’est notamment le cas des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, initialement publié en feuilletons dans le journal Le Siècle. Un exemple qui devrait faire réfléchir les détracteurs systématiques des productions à succès… et les inciter à ne pas considérer la prose populaire avec trop de hauteur. Lire Guillaume Musso et Marc Lévy ne rend pas nécessairement idiot. Et n’empêche pas de mettre aussi Hugo et Shakespeare sur sa table de chevet.
Être mordu de Twilight n’a donc rien d’infamant. A se passionner pour les aventures d’Edward et de sa Bella, à frémir avec elle quand il l’embrasse et trembler avec lui quand il la sort des griffes d’un autre vampire, on risque tout juste de ne pas résister à la tentation de lire un chapitre de plus le soir.
Pour énerver un peu plus les critiques : la bande annonce de Twilight Tentation sur le Post.fr
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