C’est désormais plausible : la Grèce pourrait sortir de la zone euro. L’affaire aurait de lourdes conséquences pour le pays et ses partenaires européens…
C’est une question de mois, peut-être de semaines si l’on en croit la presse. Dos au mur face à ses créanciers, la Grèce n’est plus en mesure de rembourser sa dette. Elle s’apprête à se retrouver en défaut de paiement, une grande première dans une zone dont l’économie était supposée être l’une des grandes réussites. Le pays entraîne au passage les marchés du monde entier dans sa dégringolade.
Cela aura nécessairement des conséquences sur l’Union européenne toute entière. Bon gré mal gré, la Grèce fait partie de la grande famille communautaire depuis 1981. Son destin, et surtout celui de ses finances, est aussi celui de 26 autres pays. Mais face à cette situation jamais vue jusqu’alors, les choix des partenaires européens sont limités. En fait, selon l’économiste Jacques Sapir, interrogé sur Le Monde.fr, il n’en existe guère plus de deux. Et ils ont le mérite d’être simples.
Choix numéro un : sauver la Grèce en alimentant ses finances. Cela pourrait passer par la création massive d’eurobonds. Problème : faut-il prendre une fois de plus le risque de dépenser des milliards dont on n’est pas certain qu’ils auront le moindre effet bénéfique ? Il semble qu’il y ait actuellement trop de doutes sur l’endettement grec et son économie pour qu’un nouveau plan d’aide massif soit décidé. « En Grèce, payer ses impôts, c’est être un con » rapporte Slate.fr. C’est tout dire…
Quant aux « camarades » européens, ils sont eux-mêmes soumis au problème de la dette et en proie au doute face aux agences de notation. François Fillon, face à la proposition de DSK d’effacer la dette grecque, a réagi vertement… sans avancer le plus petit début de solution. « L’euro nous protège » a martelé le Premier ministre. Pour combien de temps ? Il n’est pas du tout certain que les pays de la zone euro, déjà dans la tourmente, prennent encore longtemps le risque de sauver un naufragé en passe de se noyer.
Et ce d’autant moins que le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe a exclu toute mutualisation de la dette grecque. Difficile d’imaginer un sauvetage collectif sans le poids de l’Allemagne. D’où la seconde option, désormais plausible : un abandon pur et simple de la Grèce, pour laquelle sera bricolé un mécanisme de sortie de l’Euro. L’affaire sonnerait comme un triste good bye : amis grecs, débrouillez vous pour éponger votre dette avec une drachme retrouvée (et dévaluée), cela ne nous regarde plus !
Si la Grèce sortait de l’Euro…
Cela rappellerait furieusement le vieux système du « serpent monétaire européen », auquel les économies européennes qui le pouvaient se raccrochaient avant l’avènement de l’euro. Tout cela pour ça…
Mais surtout, si la Grèce était poussée à sortir de l’euro, on se rappellerait certainement de l’épisode comme d’un moment où la solidarité européenne a failli une fois de plus, cette fois au détriment de l’un des siens. Car face à une situation urgente, l’UE aura tergiversé. Le 17 septembre, les ministres des finances européens ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur un plan de secours. Les aidants multiplient les demandes de garantie, au point d’agacer les États-Unis, qui demandent au vieux continent une réaction plus rapide. Certains gouvernements, comme celui de la Finlande, se montrent particulièrement réticents. Et les opinions publiques européennes ne se précipitent pas non plus pour défendre la cause grecque.
L’avenir dira si les marchés et les médias ont condamné Athènes trop tôt. Il n’est pas impossible, après tout, qu’un pays au PIB similaire à celui du Département des Hauts-de-Seine (l’expression est de Jacques Sapir) parvienne à rassurer ses créanciers et à étaler sa dette sur une durée plus longue. Mais quoiqu’il advienne, la crise aura eu le mérite de révéler une chose : la zone euro n’est pas prête à sauver l’un des siens à n’importe quel prix. Portugal, Espagne et Italie sont prévenus. Et peut-être d’autres avec eux.
Crédit photo : Xixidu / Flickr
A lire aussi sur ce blog : la dette, pas toujours néfaste, un déclin plus grave, celui de l’Amérique, et une critique sur les (maigres) pouvoirs du Parlement européen.
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