Delphine Batho mérite son limogeage : elle ne s’est pas assez foutu du monde. Elle aurait dû s’inspirer des grands personnages de la gauche récente que sont Cahuzac, DSK et Montebourg.
Tout le monde le sait : les femmes sont d’insupportables rabats-joie. Elles ne comprennent jamais rien à la déconne entre potes de gauche.
On vient d’en avoir un nouvel exemple. Delphine Batho, ex-ministre de l’Écologie, vient d’être limogée parce qu’elle avait publiquement critiqué son budget.
Beaucoup d’observateurs ont fait le rapprochement avec le cas Montebourg. Montebourg ! Arnaud. Ce comique plus ou moins officiel qui a tricoté sur le concept de « démondialisation » (indéniablement son meilleur sketch). Arnaud avait, il y a quelques mois, légèrement tancé son premier ministre Ayrault, sur le mode « Tu fais chier la terre entière ! ». Pas publiquement, mais l’historiette était rapidement sortie dans les journaux. Ayrault avait alors demandé le limogeage de Naud-naud, Hollande n’avait pas bronché, rappelant publiquement à quel niveau il situait l’influence de son premier ministre : celui de la mer.
Batho n’a pas eu droit à cette mansuétude. Premier couac, virée ! En même temps, il faut comprendre François Hollande : Montebourg a ses coups de sang, vous savez… Il a sa mauvaise semaine mensuelle… Ses tics d’orgueil puérils… Mais au fond, Arnaud n’est pas si méchant…
Par contre, Batho, franchement, quel manque de créativité ! Quel manque de fantaisie, d’humour ! Critiquer le budget ! Évoquer publiquement un sujet aussi grave, sans même en sourire ! Les yeux dans les yeux de la France entière ! Elle aurait mieux fait de se foutre de la gueule d’Ayrault en conseil des ministres, ou de mentir les yeux dans les yeux devant ses collègues à l’Assemblée nationale, à-la-Cahuzac. Elle aurait mieux fait de baiser un liftier à la hussarde ! Pourquoi n’a-t-elle pas continué dans la déconne comme ses Glorieux Aînés ! Qu’elle nous fasse marrer ! Qu’elle se foute de la gueule du monde ! Qu’elle confesse, contrite, face-caméra, qu’elle a commis une faute morale !
Et elle fait quoi à la place ? Elle critique son budget. Mais elle s’est prise pour qui, cette pauvre fille ? Une ministre de l’Écologie ?
Virer Batho, ou comment faire montre d’une autorité de pacotille
Pour être un brin plus sérieux : selon un éditorialiste du Figaro, Hollande fait preuve, en virant Batho, « d’autorité ». Mais c’est là une autorité injuste, une autorité de pacotille. Il s’agit précisément de cette autorité à laquelle on est forcé de recourir, quand précisément on n’a aucune autorité réelle !
Quand le bateau coule, on fait quoi ? Mais voyons : on fait payer une femme ! D’une certaine manière, ça a toujours marché comme ça, pourquoi changerions-nous, la société est basée là-dessus, gauche, pas gauche… Batho paiera les pots cassés parce qu’elle a mal fait la vaisselle ! Un budget, on ne s’en plaint pas, on s’en félicite, on s’en lèche, on s’en pourlèche !… On le nettoie, on le fait briller !… Plus il est pourri, mieux on l’emballe !
A présent que Batho a donné le bâton pour se faire battre, tremble, Najat Vallaud-Belkacem !… Frémit, Aurélie Filipetti ! On me dit à l’instant que Duflot est encore à flot ? Gare, Cécile, à ne pas finir comme Batho… Votre tour approche, mesdames… Le syndrome Titanic : les femmes d’abord par dessus bord !, surtout si elles ont des enfants… Refrain social habituel… Les mâles décisionnaires rôdent, surveillent, solidaires dans leur lâcheté proverbiale à l’égard du sexe faible… Ils sont virils, mais corrects, bien fringués, irréprochables, mariés… Vous êtes femelles, et à côté de la plaque. Seule Valérie Trierweiler peut encore râler, la femâle dominante du quinquennat.
En attendant, femmes normales, continuez de nous survendre nos belles réformes sur l’égalité hommes-femmes qu’aucune entreprise ne respecte. Continuez, en petites soldates, à lutter contre le viol et la prostitution alors que la publicité affiche des gonzesses à poil retouchées sur tous les murs du monde pour vendre yaourts, parfums et gants de toilette.
Et sachez que quand il y aura quelqu’un à sacrifier, on pardonnera toujours à nos vieux potos comme Arnaud, qui ont leur franc-parler, c’est vrai, mais qui ont le sens de la formule et ne manquent pas d’humour, eux, au moins !