Sans surprise, l’actuel président algérien Bouteflika devrait être reconduit dans ses fonctions, malgré la lassitude de l’électorat. Décryptage…
Pour l’Algérie, qui se rend aux urnes aujourd’hui, le scrutin sera sans surprise… En poste depuis 1999, Abdelaziz Bouteflika devrait être réélu à la présidence de la République algérienne démocratique et populaire pour un troisième mandat de cinq ans.
Une « victoire annoncée » qui doit peu à son programme : durant la campagne qui a précédé ces élections, Abdelaziz Bouteflika s’est contenté de s’inscrire dans la continuité des réalisations passées. Son entourage insiste particulièrement sur le redressement économique du pays et la relative pacification qu’a connue l’Algérie depuis la « décennie noire ». Cependant si le pays a effectivement profité de la manne pétrolière pour rééquilibrer sa balance commerciale, si la croissance tourne autour de 6% et si la flambée de violence terroriste a connu une accalmie, beaucoup reste à faire…
Sur le plan économique, l’argent de « l’or noir » ne profite pas à tous, et l’immense majorité des salaires reste faible tandis que le prix de la vie ne cesse de s’élever. De nombreux Algériens, en particulier les Algérois, connaissent les pires difficultés pour trouver un logement. De surcroît, les grands chantiers lancés par le gouvernement n’effacent pas le poids d’une bureaucratie « mastodonte »… ni l’importance de la corruption à tous les niveaux de la vie politique.
De fait, si la majorité des Algériens s’apprêtent à confier de nouveau le pouvoir à Abdelaziz Bouteflika -qui a fait modifier la Constitution pour être en mesure de se présenter une troisième fois-, c’est moins pour le redressement économique du pays que pour la stabilité politique. Soutenu par l’armée – « pion de l’armée » estime Kader Abderrahim, chercheur à l’IRIS et spécialiste du Maghreb – Abdelaziz Bouteflika est le garant d’un système politique « dur » mais aussi d’un rempart face à la montée en puissance d’un islamisme prononcé, voire parfois radical, qui infiltre de nombreuses couches de la société depuis une dizaine d’années.
Les opposants appellent à l’abstention
Dès lors, en dépit des représailles systématiques dont ont été victimes ceux qui s’aventuraient à critiquer le pouvoir durant ces dernières années, en particulier les journalistes – trois journaux français, L’Express, Marianne et le Journal du dimanche ont été récemment interdits pour avoir critiqué Abdelaziz Bouteflika- , la paix et dans une moindre mesure la redistribution économique prévalent sur les aspirations démocratiques du peuple algérien.
Du reste, qu’il profite ou non de son image d’homme « de paix », le président sortant a toutes les chances de son côté. Il a bénéficié des réseaux de communication algériens bien plus que ses cinq opposants. Ceux-ci ont d’ailleurs préféré appeler les Algériens à boycotter le scrutin, dénonçant un simulacre d’élection. La seule carte à jouer, semble-t-il, quand la principale préoccupation du pouvoir est d’éviter une abstention massive. L’entourage du président table sur une participation de 55% à 60%. L’unique victoire que l’opposition pourrait revendiquer serait de descendre en dessous de ce seuil.
A lire aussi sur le sujet, l’article du Monde sur le conservatisme accru de la société algérienne
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L’indifférence du peuple Algérien à l’égard du pouvoir renouvelé, est probablement le plus grand désaveu adressé à Bouteflika. L’abstention est devenue la seule forme d’opposition à un pouvoir qui n’a plus aucune prise sur l’économie du pays.