La campagne électorale n’a pas eu lieu

François Hollande vient d’être élu Président de la République, sans qu’on ait parlé de grand-chose durant la campagne. Pas spécialement rassurant.

Voilà, la campagne est finie, le nouveau président de la République française (François Hollande) a été élu. Mais la campagne avait-elle commencé ?

Suis-je le seul, ces dernières semaines, à avoir ressenti un léger malaise à chaque fois que j’entendais la voix de l’un des candidats ? J’imagine que non. C’est devenu un cliché de le dire, mais répétons-le : il n’y a là presque plus rien de politique, c’est-à-dire de supérieur, de responsable, d’un tant soit peu visionnaire. C’est du marketing de basse idéologie. Un marché commun de lieux communs. Un scénario déjà écrit, comme si tout cela n’avait pas déjà été testé, compris, retesté, etc. Pourtant, tous les cinq ans, c’est mécanique, on s’agite, les mines autour de vous s’aggravent, on vous fait la leçon, on se dispute. Je m’étonne sincèrement que certains trouvent encore le moindre intérêt à cette mascarade.

Reprenons : quel problème de fond a été traité durant la campagne ? Quelles méditations ont été partagées ? A quel moment a-t-on senti un début de rassemblement honnête, responsable, tenant sur du long terme, autour d’une personnalité forte ? S’est-il dégagé un début de logique ? A-t-on parlé du sujet qui devrait tous nous préoccuper du matin au soir, l’éducation ? A peine. On se bat sur des chiffres. 30 000 postes, tant de milliards.

Au lieu de parler à tous bouts de champs de la « France », a-t-on donné une définition précise des Français que l’on voulait élever, éduquer, pour faire cette France de demain ? Non. Que signifiera être français dans vingt ans ? On verra bien.

A-t-on tenté d’apporter le moindre début de solution pour contrecarrer la tyrannie de la finance, du profit, « tyrannie » étant le terme approprié ? Hollande l’a dit, oui, mais sans avoir vraiment de suite dans les idées. Pas une fois le mot n’a été prononcé durant son premier discours au soir de l’élection (à Tulle), en tout cas.

Mélenchon ? Il l’a dit et répété, certes, mais ne pouvant s’empêcher de faire rugir, entre chacune de ses phrases, des relents d’esprit de vengeance. Coexistence, assez caractéristique au sein de l’idéalisme de gauche, d’une haine rampante, c’est-à-dire un mal-à-jouir foncier, trouvant sa résolution provisoire dans des rassemblements d’un  mauvais goût assez exceptionnel, du type revival de la Révolution française. Une telle faute de goût n’est pas pardonnable.

Le Pen fait un gros score ? Certains crient au facho, sans vouloir comprendre qu’il n’y a pas 20 % de fachos en France (si des gens pensent sincèrement que la France est un pays qui accueille mal les étrangers, c’est à n’y plus rien comprendre… qu’ils voyagent…). Mais, comme c’est beaucoup plus simple de raisonner comme ça, allons-y gaiement, rejouons une nouvelle fois l’une des chansonnettes les plus appréciables en France, les plus rassurantes, la grande complainte contre le monstre sans visage. Rien de plus épanouissant, réunissant, fédérateur. Le vote Le Pen est, au moins pour moitié, un vote de colère contre le système. Et je ne vois pas en quoi on pourrait en vouloir aux gens qui choisissent cette stratégie : il suffit de voir la nullité du spectacle proposé pour le comprendre. C’est flippant ? Peut-être, mais franchement, qui s’attend encore à des lendemains qui chantent ?

Pas le peine d’insister, par ailleurs, sur la conduite de l’UMP lors de la campagne. Fantoches. Marionnettes. On n’a même plus la force d’écrire leurs noms.

Certains diront : Hollande a été moins pire durant sa pseudo-campagne. Mais c’est parce qu’il était en position favorable. Il a géré un avantage, pas plus. Souvenez-vous de la vie au PS entre 2006 et 2011, d’un pathétique absolu, apothéose DSK. Rappelez-vous que Hollande a été traité comme un moins que rien par tous ceux qui, aujourd’hui, lui tressent des lauriers pour décrocher le job de leurs rêves (Aubry, Royal, Hamon, etc., la liste serait trop longue).

Il y a, au contraire, quelque chose de vaguement inquiétant dans la discrétion de François Hollande. Sa normalité, comme il dit. Son absence singulière de présence. Hollande a prouvé que l’on pouvait être élu président de la République française sans avoir jamais rien dit ni fait de bien marquant. L’avenir nous dira si c’est, ou non, une bonne nouvelle.

Crédit photo : Francois Hollande /Flickr

 

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